Février 2023
Chouette rencontre
Juin 2021
Et la vie continue...
Alors que le monde se confine, se barricade, s’éclipse dans l’attente angoissée d’une énième vague de cette pandémie planétaire, dehors on profite des beaux jours comme si de rien n’était, on s’active comme d’habitude.
La vie, elle, n’attend pas.
Octobre 2020
Rien ne se perd
Un ours est passé récemment sur le trottoir de bois, y laissant un présent qui ne laisse planer aucun doute sur son auteur. Le Tamia rayé, occupé à amasser des graines dans son terrier en prévision d'un long hiver, y voit une belle opportunité. Si l'ursidé était intéressé par la portion charnue du fruit, le rongeur, lui, se remplit les bajoues avec le grain. Plutôt que de courir en tout sens pour rassembler son butin, il préfère profiter de ce cadeau providentiel.
En observant l'opportuniste, je souris en pensant aux mots de l'auteur québecois André Desbiens :
"Si ton but est noble, les moyens pour l'atteindre peuvent l'être un peu moins."
Juin 2020
Sur la voie ferrée
Un renardeau attend le retour de la renarde et du repas qui l'accompagne. Seuls quelques trains touristiques empruntent encore cette portion de voie vieillissante. C'est un endroit idéal pour y loger une famille. Le ballast accumule la chaleur au printemps, la neige y fond de bonne heure. On est toujours au sec et les amas de billes de bois servent de cachette ou de terrain de jeux. La vue y est imprenable! De temps à autre, selon un horaire très régulier, on s'interrompt. On se cache pour laisser passer le monstre de fer. Et puis la vie reprend son cours...
Mars 2020
Le réveil
Les jours allongent enfin et on se plaît à imaginer l’arrivée du printemps même si le thermomètre a encore quelques doutes.
Un jeune raton-laveur est sorti de son sommeil hivernal, lui aussi convaincu que c’est pour bientôt. Hirsute, hésitant, semblant mal réveillé, il fait le tour des mangeoires à oiseaux pour profiter de quelques graines tombées sur le sol. Après, ce seront les croquettes des chats du voisin qui serviront de collation et enfin, un petite tournée de compost.
Ce n’est peut être pas encore le printemps et l’opulence des beaux jours mais pour un ventre affamé, c’est Byzance!
Janvier 2020
L’extraordinaire, c’est à deux pas!
De passage en ville, brièvement pour que cela reste supportable, je traverse le parc pour une pause verdure d’allure thérapeutique. Trop de bruit, de béton, de précipitation. Besoin d’un intermède nature, juste quelques minutes.
Même si tout est tranquille, figé et blanchi par l’hiver, les grands arbres me font l’effet d’un aimant. Dans les saules, un Grand-duc d’Amérique se repose au soleil de janvier. Il trouve en ce lieu pléthore d’écureuils bien gras nourris par les visiteurs. Si la saison est rude, le garde-manger est lui bien rempli!
Le nez en l’air, j’observe le rapace en philosophant sur sa présence inhabituelle à cet endroit. Nul besoin, en effet, de courir aux antipodes pour découvrir l’extraordinaire. Il suffit parfois simplement de traverser la rue.
Une bise glacée écourte ma contemplation. Le menton rejoint la chaleur du col. Je retourne dans la jungle.
Août 2019
Un monde de différences
Sur le sentier, je croise une Tortue peinte affairée. Je lui tire son portrait au plus vite. Une fois disparue dans les herbes, le retour sur un chemin facile me permet de penser à notre rencontre, comme pour prolonger ces instants éphémères.
Le monde occidental ne cesse de l’affubler de tout les péjoratifs de lenteur, de lourdeur et de maladresse. Les Premières Nations, elles, louent son courage, sa détermination. Selon la plupart de ses légendes, le reptile contribua à la création du monde terrestre en le portant sur son dos. Les autochtones désignent d’ailleurs le continent américain comme l’Île de la Tortue. Deux visions complètement antagonistes, que tout sépare. L’une aveuglée de raillerie, l’autre beaucoup plus humble et respectueuse.
Elle a beau avoir le dos large, la tortue, de toute façon, n'en a cure!
Octobre 2018
Haïku de saison
La rosée d'automne
À l'orée du bois un ours
Le feu des érables
Septembre 2018
La leçon d'un tyran
Premiers jours d'automne, le ballet des migrateurs est franchement entamé. Pour pimenter nos observations ornithologiques, nous filons à la rencontre d'un Tyran des savanes, une espèce rarissime, égarée à plusieurs milliers de kilomètres au nord de son aire de distribution sud-américaine. J'accompagne mon ami Michel, la crème de la crème en matière d'oiseau. Notre préparation est minutieuse : nous savons où se trouve le volatile depuis quelques jours. Nous suivons la situation quotidiennement. Juste six heures de route aller-retour et l'affaire est réglée, dans les jumelles!
Une fois sur place, la recherche commence. Au fil des heures la fébrilité fait place à l'impatience, l'espérance à la désillusion. Notre dernière chance, comme dans le jeu télévisé, faire appel à un ami pour qu'il vérifie sur le net si l'oiseau a été vu aujourd'hui. Nada! Rien! Les journées raccourcissent, nous rentrons. Bredouilles! Comble de la frustration, il sera revu dès le lendemain par d'autres ornithologues au même endroit.
Sur la route, je repense au tyran et à cette leçon d'une infinie sagesse qu'il vient de nous servir : malgré la meilleure des préparations et peu importe nos compétences, au final, c'est quand même Dame Nature qui décide...
Avril 2018
Les oiseaux noirs
Plusieurs semaines déjà à faire le pied de grue, à espérer, à conjecturer, à lorgner aux mangeoires en espérant voir ou entendre enfin les premiers carouges, quiscales et autres vachers, ces oiseaux noirs annonciateurs de l'arrivée du printemps. Ils forment l'avant-garde des volatiles qui défileront bientôt pour le plaisir de l'ornithologue. Bien que d'apparence terne et sombre, le plumage de ces oiseaux révèle pourtant des nuances iridescentes et des couleurs métalliques chatoyantes. Souvent ignorés, honnis voir maudits, ils méritent assurément un autre regard et certainement mieux qu'une volée de plomb.
Mars 2018
Nez à trompes
Queen Elizabeth National Park, Ouganda.
Une trentaine d'éléphants ont décidé de traverser la piste. La compagnie passe... l'observateur retient son souffle. Ils sont tellement proches que l'émerveillement d'une telle rencontre pourrait laisser place à une certaine inquiétude. Trop nombreux, trop gros, trop proches. On se sent soudainement bien minuscule, insignifiant même. Ce 'nez à trompes' providentiel nous enseigne une grande leçon d'humilité et, fait bien trop rare de nos jours, nous replace à notre réelle condition d'être humain, moins arrogant, moins puissant, plus fragile, plus humain en somme...
Automne 2017
A l'ombre des grands saules
Promenade matinale en bord de ruisseau. Un raton-laveur est passé par là, cette nuit probablement. Le soleil a sonné la fin de sa vadrouille et le début de la mienne. Les empreintes sont belles, bien marquées dans la boue. On distingue sans problème les traces de ses doigts fins qu'il utilise avec une dextérité extraordinaire, inégalée. Je perds assez vite sa piste dans le herbes hautes détrempées par la rosée. Vraiment pas envie de me mouiller ce matin. Je rejoins le sentier. Poule mouillée!
Septembre 2017
La révérence
C'est par cette gracieuse courbette que le Fou de Bassan revendique les quelques centimètres carrés nécessaires pour l'installation de son nid en haut de la falaise. Quand on partage la place avec quelques cinquante mille autres couples de son espèce, le langage corporel est bien plus efficace que de s'égosiller au travers du tintamarre. Même le dernier des fous a bien compris que ce n'est pas celui qui crie le plus fort qu'on entend le mieux...
Août 2017
Un visiteur qui dérange
La fin de l'été, c'est l'époque de l'année où la Moufette rayée parcourt nos jardins à la recherche des gros vers blancs qu'elle déterre habilement. Du coup, le voisinage et son gazon vert impeccable (oui, maintenant vous le connaissez!) est au bord de la syncope. On accuse le mustélidé de tous les maux, on le fuit pour quelques méfaits pestilentiels. C'est pourtant l'un des mammifères nord-américain les plus utiles pour l'agriculteur et le jardinier parce qu'il se nourrit d'insectes et de rongeurs.
Affairée à sa maraude, elle me laisse approcher tranquillement. Rarement pressée, la moufette semble même souvent insouciante. C'est qu'en cas de danger ou de stress, elle ne cherche son salut ni dans la fuite, ni dans la dissimulation mais compte sur ses glandes anales. Prendre son temps et avoir confiance en son derrière, une bien belle philosophie!
Juillet 2017
Les herbes folles
L'été, le vacarme et le balais infernal des tondeuses à gazon a commencé. Les enragés du pissenlit sont au bord de la crise de nerfs. A grand renfort d'engrais, d'herbicides et d'antimousse, le cartésien voisinage épuise la moitié de la nappe phréatique pour étancher sa soif d'un tapis toujours plus vert. Haro sur la diversité, vive la pensée unique!
En participant moi-même à cette tornade sonore, j'épargne pour quelques temps les bouquets sauvages qui crèvent la monotonie. Se priver du rouge des épervières, du jaune des pissenlits, du mauve de la bugle ou du bleu des myosotis, c'est aussi manquer le va-et-vient des insectes, la danse des abeilles, le vol du bourdon et les cascades du colibri. Une fois les couleurs ternies et la miellée terminée, il sera toujours temps d'être un voisin normal qui tond sa pelouse religieusement.
A la barre de ma machine infernale, au travers de la cacophonie, des vibrations et des vapeurs d'essence, je m'interroge à savoir qui, des herbes sauvages ou des monomaniaques du gazon vert, sont les plus fous.
Mai 2017
De retour, enfin!
Au terme d'une attente interminable et d'un printemps qui semble lui aussi nous bouder, c'est l'excitation autour des nichoirs. A peine arrivée de Floride, du Golfe du Mexique ou d'Amérique centrale, l'Hirondelle bicolore revendique son titre de propriété. C'est que la compétition est rude pour cette espèce cavernicole. En matière d'habitation c'est souvent premier arrivé, premier servi!
A observer ce ballet aérien, on ne sait ce qui, de l'arrivée du printemps ou de l'oiseau, nous réjouit le plus...
Avril 2017
King size
Matinée brumeuse et humide sur la piste de latérite à la recherche des éléphants. Ils ont l'immensité africaine pour territoire mais heureusement pour moi laissent sur leur passage des indices qui ne trompent pas. Ici, un acacia brisé qui n'a pas résisté à la poussée du pachyderme affamé. Là, une série d'empreintes clairement marquées sur la terre rouge. Et enfin le royal cadeau dont la fraicheur indique que son propriétaire n'est pas loin! Vu la taille de l'affaire, c'est une journée chanceuse qui commence! Même le célèbre Général Cambronne en serait fier!
Mars 2017
Haiku de saison
Vent glacial d'hiver
Sur le carreau la forêt
Le poêle ronronne
Février 2017
Au coeur de l'hiver
Une autre journée glaciale où le thermomètre est en dépression. La pierre et le bois se fendent tandis que le soleil, malgré ses efforts, ne réchauffe plus rien. Le vent même le plus léger est un supplice. Le vivant, s'il l'est encore, semble en mode survie. Et pourtant, des signes, des traces, des empreintes signalent que tout n'est pas perdu, que ce n'est qu'une question de temps, de patience.
Au bord du sentier, le Grand Pic a éclaté jusqu'au coeur le bois de la pruche, le résineux local. Tout ce travail pour atteindre la colonie de fourmis charpentières qui y vit recluse, en léthargie, dans l'attente de jours meilleurs. Des heures de labeur pour quelques insectes.
Sur le chemin du retour, je pense à ce délicat équilibre entre le pic, la pruche et la fourmi. La différence entre vivre, survivre ou périr me semble vraiment ténue en cette saison hivernale.
Au bas de la colline, l'odeur du poêle à bois me sort de ma méditation. La cheminée fume, c'est la promesse d'un thé brûlant qui réchauffe plus que les doigts, lui. Plaisirs d'hiver!
Janvier 2017
Charivari hivernal
D'habitude si discret et solitaire, le Gros-bec errant profite de l'hiver pour socialiser. Son cri, un 'tchîp' monosyllabique assez fade, prend des allures de vacarme lorsque plusieurs dizaines d'oiseaux se rassemblent à la mangeoire ou convoitent les samares des érables. Dans son cas, le nombre fait la cacophonie.
Cette promiscuité révèle également son côté querelleur, tapageur même. On règle ses comptes à cor et à cri dans un délicieux foutoir, un tourbillon coloré tant apprécié en ces journées trop courtes de l'hiver.
Décembre 2016
Hamerkop : l'insatiable bâtisseur
Saison des pluies sur la terre rouge d'Afrique. Au bord du marigot s'active l'Ombrette africaine. L'échassier, monomaniaque, a l'obsession bâtisseuse. Il édifie bon an, mal an, de trois à cinq nids volumineux, chacun avec toit et entrée. Le tout cimenté de boue. Partenaire ou pas, construire pardi! Avec sa forme de marteau, l'oiseau affiche la tête de l'emploi en somme. Cette particularité anatomique lui a valu son nom afrikaans : hamerkop. Pour peu, en l'observant, on donnerait foi à la théorie désuète du transformisme - le besoin crée l'organe et se transmet à la descendance - chère au naturaliste Lamarck.
Cette frénésie de construction, jamais assouvie, profite à bien d'autres oiseaux heureux de récupérer les nombreux nids disponibles. Une aubaine ces clefs sur portes!
Novembre 2016
La tournée nocturne du goupil
Crépuscule d'automne. La curiosité m'a encore poussé plus loin que de raison et les jours désormais plus courts me rappellent à l'ordre. Trop loin, trop tard, j'en serai quitte pour une marche nocturne. Enveloppé par la nuit, je hâte le pas. Suivre le sentier, longer la clairière à l'abri des grands arbres, sauter le fossé, se faufiler entre les chênes rouges, un chemin mille fois emprunté mais que l'obscurité teinte d'une atmosphère particulière cette fois. Un dernier fossé à franchir et ce sera enfin la route de campagne, rassurante, à ces heures où l'imagination vous joue ses meilleurs tours.
Une ombre sur la droite, une silhouette furtive, curieuse. Au travers des jeux d'ombres, je distingue un renard qui, par quelques détours, approche. Le goupil a l'avantage, il est nyctalope, je ne le suis pas. S'il me voit très clairement dans le noir, je ne peux que le deviner. Complice de l'obscurité, il approche toujours plus près puis disparaît, avalé par la nuit. D'où vient-il? Où s'en va-t-il? Le renard emporte avec lui son mystère et les réponses à mes questions.
Au loin, le village, ses lumières.
Octobre 2016
Fin de journée dans le verger
Rendez-vous familial pour un festin d'automne au pied d'un pommier chargé de fruits sucrés.
Septembre 2016
Visite d'une dame en blanc
Levé avant l'aube, à l'heure où l'on doute de tout. Même les poules me prennent pour un fou. J'ai rendez-vous avec un visiteur inhabituel dans le marais, une dame blanche venue du sud. Dans l'attente de la belle, bien planqué parmi les quenouilles, je rêvasse à cet oiseau qui revient de loin. Pour quelques plumes sur le chapeau des dames du siècle dernier, la Grande Aigrette a bien failli y laisser sa peau. Si les modes passent, la destruction des milieux humides est malheureusement irréversible et d'actualité. A tour de bras, on préfère drainer, combler, développer, construire. Tellement plus "rentable" que préserver, contempler, léguer. A refaire le monde, j'en oublie presque le don de sang que je suis en train de faire aux moustiques du coin, le prix à payer pour une place aux premières loges.
L'aube, enfin. Les acteurs se mettent en place : les premiers concertos des troglodytes, les canards cancanent, les grenouilles baissent le ton. Sous une lumière de feu, tout est prêt pour une touche de blanc.
Août 2016
Haiku de saison
Chaleur de l'été
Sans un nuage pour ombrage
Le vol du bourdon
Juillet 2016
La grenouille et le photographe
Les pieds dans l'eau d'un fossé et l'oreille tendue, j'essaie de localiser une grenouille coassant dans la végétation, promesse d'une photo intéressante. A mon approche elle se tait. Une onde dans l'eau, une ombre se faufile, à moitié immergée. C'est une Couleuvre rayée qui trouve refuge dans les buissons, outrée. Visiblement, nous étions là pour la même chose. A peine le temps d'une photo à la sauvette et le reptile se faufile, le ventre vide et hors de portée de l'objectif, dans le fouillis végétal.
La grenouille, elle, se marre de plus belle.
Juin 2016
Resto panoramique
Au détour du sentier, un porc-épic grimpe au faîte d'une aubépine : une histoire épineuse en somme. Malgré son air pataud, il fait preuve d'une agilité surprenante. Au cours de l'évolution, il a d'ailleurs troqué le premier doigt de ses pattes postérieures pour une pelote digitale mobile, qui lui sert à améliorer ses prises. Cette ascension de routine lui permet d'atteindre les bourgeons et jeunes feuilles tendres dont il fait désormais bombance. Finis les mois de vache maigre de l'hiver, à ronger les écorces en attendant des jours meilleurs!
Armé de ses piquants, le rongeur se moque bien des épines du végétal. Sûr de son invulnérabilité en ce haut lieu, il ne déroge pas à ses habitudes de lenteur et reste indifférent à l'effervescence printanière, à la marche du monde qui l'entoure.
Mai 2016
Le réveil de l'ours
Après un sommeil qui semblait s'éterniser, le plantigrade est enfin sorti de sa torpeur hivernale. Pourtant fort discret à cette époque de l'année, ses empreintes dans la boue trahissent son retour et sa recherche insatiable d'une nourriture encore trop rare.
Avril 2016
Les oiseaux de passage
Encore une épaisse couche de neige au sol et pourtant le fond de l'air, lui, est désormais clairement printanier. Au loin, avec une oreille attentive, on entend les premiers vols de bernaches et d'oies. Que le ciel se dégage, le vent tourne et ce sera un défilé aérien qui fascine les hommes depuis la nuit des temps. Le nez en l'air, on se plaît à suivre les migrateurs du regard. Trop vite disparus à l'horizon, seuls nous restent les mots et l'émotion du poète* :
Oh ! les gens bienheureux !... Tout à coup, dans l'espace,
Si haut qu'il semble aller lentement, un grand vol
En forme de triangle arrive, plane et passe.
Où vont-ils ? Qui sont-ils ? Comme ils sont loin du sol !
Regardez-les passer ! Eux, ce sont les sauvages.
Ils vont où leur désir le veut, par-dessus monts,
Et bois, et mers, et vents, et loin des esclavages.
L'air qu'ils boivent ferait éclater vos poumons.
Regardez-les ! Avant d'atteindre sa chimère,
Plus d'un, l'aile rompue et du sang plein les yeux,
Mourra. Ces pauvres gens ont aussi femme et mère,
Et savent les aimer aussi bien que vous, mieux.
Pour choyer cette femme et nourrir cette mère,
Ils pouvaient devenir volaille comme vous.
Mais ils sont avant tout les fils de la chimère,
Des assoiffés d'azur, des poètes, des fous.
Jean Richepin, 1876
* C'est à mon ami Gérard, amoureux de la langue française et des forêts de l'Ardenne, que je dois la découverte de ce classique de la poésie. Merci à toi!
Mars 2016
Oisif thé hivernal
Vent hystérique, froid polaire, rideau de neige épaisse et luminosité morose, de quoi dissuader un photographe de quitter la douce chaleur du poêle à bois. C'est le moment parfait pour infuser quelques feuilles séchées et rêvasser un peu.
A l'instar d'un haiku ou d'une photographie intéressante, chaque bol de thé, qu'il soit d'Asie ou d'Afrique, raconte une histoire, invite au voyage, dévoile mille visages.
Pour peu qu'on prenne le temps bien sûr... Eloge du farnien-thé.
Février 2016
Amauligaq : un visiteur venu du nord
C'est par ce nom étrange que les Inuit* désignent le Plectrophane des neiges, ce passereau que l'on aperçoit dès le mois d'octobre et qui nous annonce l'arrivée du temps froid et de l'hiver. Pour l'Inuk, c'est l'inverse : l'arrivée des premières volées est annonciatrice du printemps car c'est le migrateur le plus empressé à pointer le bout de son bec là-haut. Le volatile est d'ailleurs l'un des nicheurs le plus nordique de tous les oiseaux terrestres, bien au-delà du cercle polaire. Il supporte stoïquement les froids et les vents cinglants quand nous, pauvres humains, frissonnons à la moindre bise glacée.
* En Inuktitut, la langue des autochtones de l'arctique, le nom Inuit est déjà au pluriel et signifie le "peuple". L'accorder avec un "s" est donc superflu. Son singulier est Inuk qui se traduit par "être humain". Inuuk quant à lui désigne "deux personnes". Source : Gouvernement du Nunavut.
Janvier 2016
Stairway to heaven
Visite à un géant sur la colline ce matin. Un pin pluri-centenaire s'élance vers le ciel. Les pieds dans la neige et la pénombre, il étire sa chevelure au soleil, la tête dans les étoiles. Malgré son imposante stature, c'est aussi sa dimension symbolique, presque religieuse, qui inspire le respect. Comment ne pas y voir la victoire de la lumière sur l'obscurité? Un intermédiaire, un trait d'union entre le monde des hommes et celui des dieux? Un escalier vers le divin, le spirituel !
Salutations au colosse. Humilité.
Décembre 2015
Provisions hivernales
Première neige épaisse, l'Ecureuil roux s'agite pour accumuler ses réserves de graines et, au plus vite, planquer son magot à l'abri de la convoitise d'autres intéressés.
Novembre 2015
Drôle d'époque pour un cerf
Fin d'automne, l'érablière a laissé tomber le flamboyant de ses feuilles colorées pour le grisâtre de son écorce. Retour au calme saisonnier. Seul un cerf se faufile entre les troncs à la recherche d'une femelle et de ses faveurs, sans doute. Il oublie sa discrétion habituelle et approche, téméraire. Absorbé par la fièvre du rut, le cerf en perd la tête et souvent la vie d'ailleurs, pour une paire de bois qui rend les hommes fous et obsédés. Commune damnation des cervidés.
Février 2023 :